Il se rêvait en Spaggiari des temps modernes. Mais Cantona, c'est plutot l'Ubu-Roi de la peoplitude.
Auxerre, Marseille, Bordeaux, puis Leeds et surtout le mythique Manchester United ! Sa carrière de footballeur l’a auréolé de gloire, jusqu’à le conduire, en 2005, à être sacré meilleur joueur de tous les temps de la Première Ligue anglaise, sponsorisée par la banque Barclays ! Depuis sa retraite footbalistique en 1997, à l’âge de 31 ans, Eric Cantona se consacre à la peinture, au cinéma, à la photo. En un mot... il s’emmerde ! C’est sans doute là le principal ressort de son grotesque appel à la « révolution financière », qui se conclut en bonne logique par un flop retentissant.
Tout est parti d’une interview vidéo accordée en octobre à Presse-Océan. Mal rasé, sans doute pour faire proche du peuple, vêtu d’un sweat rouge frappé d’une virgule (la révolution, version Nike ?) et avachi dans un canapé, Cantona commence par y développer, au sujet du mouvement contre la réforme des retraites, une analyse politique digne de Patrick Sébastien, au moins : « mais y’a une possibilité… Y’a quelque chose à faire, eh ! Mais ça me gène un peu, ceux qui vont dans la… ‘Fin, ça me gène pas, mais aujourd’hui, j’pense que…parce que c’est important de le défendre… Mais aujourd’hui, aujourd’hui, aller dans la rue, c’est quoi ! Ils te retournent le truc contre toi. Aujourd’hui, c’est plus comme ça, quoi, qu’il faut faire les choses. » (sic)
Enfin, Canto glisse le mot magique, drapé d'un slogan imparable : « la révolution est très simple, con… à faire ». Sans doute une réminiscence de la pub qu'il a tourné pour L'Oréal où il déclarait que "rester cool, c'est simple" ! Le concept qu’il lance ainsi, tout le monde le connaît aujourd’hui : il faut retirer son argent des banques et faire en sorte que le système s’écroule. Ben voyons ! Alors que l’interview, ou plutôt le monologue, se poursuit (le journaliste est-il en pâmoison devant le King ou s'est-il juste endormi ?), le voici qui rêve éveillé, revendiquant la paternité spirituelle de Spaggiari, imaginant que 3, puis 10, puis 20 millions de personnes puissent suivre son geste.
Son geste ? Quel geste ? Après avoir convoqué la presse ce 7 décembre pour l’admirer en train d’effectuer un retrait de 1.500 euros à la BNP d’Albert, Eric Cantona a tout simplement fait faux bond, sans doute déjà conscient du raté magistral de sa « révolution financière », laquelle n'a réussi à conquérir que 40.000 fans sur Facebook, brassant finalement plus d'air que de billets. Non, Eric « Laguna » Cantona ne sera pas le digne successeur d’Ernesto « Che » Guevarra, ce qui confirme que les révolutions ne sont que rarement conduites par des milliardaires quadragénaires et blasés.
Il y a 5 ans, lors d’un passage remarqué dans l’émission d’Ardisson, Cantona n’était pas encore ce Robin des Bois de carton-pâte et faisait même preuve d’une certaine honnêteté, semblant assumer son statut de « rentier » et de « milliardaire », expliquant qu’il avait placé son argent « en assurance-vie, en actions, en immobilier ». Aujourd’hui, il crache dans la soupe qu'il bouffe avidement depuis des années. Lui et... sa femme, Rachida Brakni, récemment vue dans une pub pour... la banque LCL !
L'ex-star du football montre enfin son vrai visage : ce n'est plus King Canto, c’est Ubu, roi des people, un milliardaire désoeuvré et sans repères. « Les cons, ça ose tout, c’est même à ça qu’on les reconnaît », s’exclame Lino Ventura dans Les Tontons Flingueurs. Les riches aussi ? Pas tous, fort heureusement ! De l'autre côté de l'Atlantique, Warren Buffett, en prenant d'audacieuses positions contre le principe de l'héritage, nous démontre que richesse immense ne rime pas nécessairement avec indécence.
Emmanuel Schafroth