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8 décembre 2010 3 08 /12 /décembre /2010 11:31

Il se rêvait en Spaggiari des temps modernes. Mais Cantona, c'est plutot l'Ubu-Roi de la peoplitude.

 

Auxerre, Marseille, Bordeaux, puis Leeds et surtout le mythique Manchester United ! Sa carrière de footballeur l’a auréolé de gloire, jusqu’à le conduire, en 2005, à être sacré meilleur joueur de tous les temps de la Première Ligue anglaise, sponsorisée par la banque Barclays ! Depuis sa retraite footbalistique en 1997, à l’âge de 31 ans, Eric Cantona se consacre à la peinture, au cinéma, à la photo. En un mot... il s’emmerde ! C’est sans doute là le principal ressort de son grotesque appel à la « révolution financière », qui se conclut en bonne logique par un flop retentissant.


Tout est parti d’une interview vidéo accordée en octobre à Presse-Océan. Mal rasé, sans doute pour faire proche du peuple, vêtu d’un sweat rouge frappé d’une virgule (la révolution, version Nike ?) et avachi dans un canapé, Cantona commence par y développer, au sujet du mouvement contre la réforme des retraites, une analyse politique digne de Patrick Sébastien, au moins : « mais y’a une possibilité… Y’a quelque chose à faire, eh ! Mais ça me gène un peu, ceux qui vont dans la… ‘Fin, ça me gène pas, mais aujourd’hui, j’pense que…parce que c’est important de le défendre… Mais aujourd’hui, aujourd’hui, aller dans la rue, c’est quoi ! Ils te retournent le truc contre toi. Aujourd’hui, c’est plus comme ça, quoi, qu’il faut faire les choses. » (sic)

 

Enfin, Canto glisse le mot magique, drapé d'un slogan imparable : « la révolution est très simple, con… à faire ». Sans doute une réminiscence de la pub qu'il a tourné pour L'Oréal où il déclarait que "rester cool, c'est simple" ! Le concept qu’il lance ainsi, tout le monde le connaît aujourd’hui : il faut retirer son argent des banques et faire en sorte que le système s’écroule. Ben voyons ! Alors que l’interview, ou plutôt le monologue, se poursuit (le journaliste est-il en pâmoison devant le King ou s'est-il juste endormi ?), le voici qui rêve éveillé, revendiquant la paternité spirituelle de Spaggiari, imaginant que 3, puis 10, puis 20 millions de personnes puissent suivre son geste.


Son geste ? Quel geste ? Après avoir convoqué la presse ce 7 décembre pour l’admirer en train d’effectuer un retrait de 1.500 euros à la BNP d’Albert, Eric Cantona a tout simplement fait faux bond, sans doute déjà conscient du raté magistral de sa « révolution financière », laquelle n'a réussi à conquérir que 40.000 fans sur Facebook, brassant finalement plus d'air que de billets. Non, Eric « Laguna » Cantona ne sera pas le digne successeur d’Ernesto « Che » Guevarra, ce qui confirme que les révolutions ne sont que rarement conduites par des milliardaires quadragénaires et blasés.

 

Il y a 5 ans, lors d’un passage remarqué dans l’émission d’Ardisson, Cantona n’était pas encore ce Robin des Bois de carton-pâte et faisait même preuve d’une certaine honnêteté, semblant assumer son statut de « rentier » et de « milliardaire », expliquant qu’il avait placé son argent « en assurance-vie, en actions, en immobilier ». Aujourd’hui, il crache dans la soupe qu'il bouffe avidement depuis des années. Lui et... sa femme, Rachida  Brakni, récemment vue dans une pub pour... la banque LCL !


L'ex-star du football montre enfin son vrai visage : ce n'est plus King Canto, c’est Ubu, roi des people, un milliardaire désoeuvré et sans repères. « Les cons, ça ose tout, c’est même à ça qu’on les reconnaît », s’exclame Lino Ventura dans Les Tontons Flingueurs. Les riches aussi ? Pas tous, fort heureusement ! De l'autre côté de l'Atlantique, Warren Buffett, en prenant d'audacieuses positions contre le principe de l'héritage, nous démontre que richesse immense ne rime pas nécessairement avec indécence.

 

Emmanuel Schafroth

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5 octobre 2010 2 05 /10 /octobre /2010 11:08

Coupable et re-coupable ! Le verdict qui vient de tomber à l'encontre de Jérôme Kerviel ne laisse aucune place aux circonstances atténuantes pour l'ex-tarder de la Société générale. Il se veut exemplaire, mais laisse une bien curieuse impression.

 

Qu'on en juge ! Jérôme Kerviel, qui n'est certes pas un agneau, écope de 5 ans de prison dont 3 ferme, mais surtout est condamné à rembourser... 4,9 milliards d'euros à la Société générale, aux titre des dommages-intérêt. C'est là où le tribunal semble se prendre les pieds dans le tapis. D'une part, ce jugement tient à une justice-spectacle "à l'américaine" qu'on pourrait avec avantage laisser à nos amis d'outre-Atlantique. Il est évident en effet que, même en mettant à l'amende Kerviel et ses descendants  sur 10 générations, ce "remboursement" ne prendra jamais forme. Si l'ancien financier a joué avec les milliards (les dizaines de milliards, même !), il n'a en effet jamais détourné d'argent à son profit. Fraudeur, oui... chacun en conviendra ! Escroc, non !

 

Ensuite, le montant des dommages auxquels il est condamné correspond exactement au montant de la position "frauduleuse" découverte en janvier 2008. Ce jugement implique donc que Kerviel, un lampiste qui a certes dérapé, mais un lampiste tout de même, est le seul responsable. Cela remet bien en lumière le point le plus gênant du procès... le fait qu'il fasse peser toute la responsabilité sur un seul homme, alors que la responsabilité des supérieurs du trader aurait EVIDEMMENT du être examinée.

 

Jérôme  Kerviel est le méchant, mais à la Société générale, tout va bien... mis à part que l'affaire fait encore des "victimes" au sein du groupe. Hugues Le Bret ne vient-il pas de démissionner de la présidence de Boursorama (filiale de la SG) pour retrouver sa liberté de parole, ou plutôt d'écriture ! Il sort en effet un livre sur l'affaire, avec un sens parfait du timing. Le président du tribunal a taxé Kerviel de cynisme, mais ce n'est apparemment pas le seul.

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4 juillet 2010 7 04 /07 /juillet /2010 14:46

Si les sociétés de jeux en ligne avaient le droit de proposer aux internautes de miser sur les politiques, notre président aurait une sacrée cote d'outsider.

 

Alors que la reprise du journal Le Monde a fait couler beaucoup d'encre, il ne fait pas de mystère que Nicolas Sarkozy a oeuvré en coulisses pour que France Télécom entre dans la bataille. Las, c'est dans le giron de BNP que le quotidien du soir devrait bientôt se retrouver. BNP ? Il ne s'agit évidemment pas de la banque bien connue mais du trio constitué de Pierre Bergé, Xavier Niel (patron de Iliad/Free) et Mathieu Pigasse.

 

On n'assistera donc pas à ce mariage de la carpe et du lapin qu'aurait été la reprise d'un groupe de presse surendetté par un opérateur de télécoms qui a lui-même mis des années à résorber le passif excessif contracté à la folle période de la bulle Internet. Tant mieux, sans doute, pour les actionnaires de France Télécom, même si les 25,2 millions d'euros de pertes générées par le groupe Le Monde en 2009 sont une goutte d'eau à l'échelle de sa propre rentabilité, désormais redevenue solide.

 

Fin de l'histoire, donc. Reste que cette manipulation élyséenne pour tenter de mettre sous tutelle le journal pose certaines questions de déontologie politique. Il y a en effet dans cette affaire une double confusion. D'un côté, il semble que Nicolas Sarkozy ait en la matière - serait-ce une habitude ? - confondu ses intérêts personnels (faire la nique à Xavier Niel, ennemi de son ami Martin Bouygues) et ceux de l'Etat qu'il est censé incarner.

 

La deuxième confusion porte sur le statut de France Télécom lui-même. Le pouvoir politique se comporte comme s'il ignorait que l'essentiel du capital de l'opérateur historique a été vendu, au fil des années, à des intérêts privés. Certes, L'Etat, en direct et via le Fonds stratégique d'investissement, reste le premier actionnaire du groupe, mais il est... minoritaire !

 

Une opération aussi discutable stratégiquement et financièrement (la presse n'est pas véritablement le métier de France Télécom et Le Monde ne va pas bien !) est l'affaire de TOUS les actionnaires de l'opérateur, qui n'est PLUS une société étatique.

 

Nicolas Sakozy s'était auto-proclamé candidat de la rupture pour se faire élire, mais certaines habitudes ont la vie dure dans notre pays ! Et son intervention malheureuse dans le dossier du Monde révèle surtout une profonde méconnaissance de l'affaire. Dans le schéma capitalistique fort complexe du journal, ce sont en définitive les salariés qui décident. Et ceux-ci se sont fait un malin plaisir de choisir le candidat honni par l'Elysée.

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11 mai 2010 2 11 /05 /mai /2010 09:50

Mais de quoi se mêle-t-elle ? Grâce à la crise grecque, les marchés ont trouvé un nouvel oracle boursier en la personne de Christine Lagarde.

 

Notre Ministre de l'Économie, de l'Industrie et de l'Emploi (et du CAC40 ?) estime en effet ce matin que la forte hausse des marchés boursiers enregistrée hier (+9,66% pour le CAC40), en réponse au plan de résolution de la crise grecque, est "excessive".

 

Mais, dans le même temps, elle qualifie ledit plan de "tournant historique pour l'Europe". Si c'est historique, ça mérite une réaction hors normes de la part du marché, non ? Il faudrait savoir ! Et surtout, on atttend avec impatience que Madame Lagarde nous dévoile son objectif de cours sur le CAC, ce qui serait la seule manière de quantifier dans quelle mesure le marché a effectivement commis un excès !

 

Le problème des pourcentages de progression, c'est qu'il faut savoir à quel chiffre de base ils s'appliquent. En l'occurrence, les gains enregistrés hier sur l'indice ont pris effet sur le niveau de 3.392,59 points touché vendredi soir, après un recul de 14,1% en deux semaines pour le CAC40. La hausse d'hier peut donc être plus sûrement interprétée comme la correction des excès baissiers précédents que comme un excès en elle-même.

 

Tout boursier qui se respecte s'accordera sur la totale inutilité des propos de Madame Lagarde. Au final, celle-ci ne fait que donner la désagréable impression de se focaliser sur le chiffre du jour sans vraiment chercher à le comprendre... tout un symbole d'une politique qui privilégie l'événement  à impact médiatique immédiat plutôt que la gestion de long terme.

 

Un jour, peut-être, l'Europe aura une politique économique commune avec une véritable vision sur son développement,. Et ça, ce sera un tournant historique !

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20 avril 2010 2 20 /04 /avril /2010 10:13

Il se trouve encore sur les forums boursiers des audacieux pour conseiller Air France KLM à l'achat sur la foi des bougies japonaises et autres figures imparables qu'ils lisent dans leur boule de cristal.

 

A bien y réfléchir cependant, n'y-t-il pas des moments où la lucidité doit l'emporter sur les automatismes, ceux-là même qui fonctionnent... sauf quand ils ne fonctionnent pas ! L'analyse graphique n'est rien d'autre qu'une modélisation basée sur des comportements passés. Elle ne fait que donner une probabilité de gain et son usage peut se révéler dangereux en cas d'événement exceptionnel.

 

Or, si l'on fait fonctionner normalement un cerveau humain standard tant soit peu connecté au monde extérieur, quelles leçons  boursières de base peut-on tirer de l'éternuement géant de ce fameux volcan dont personne n'ose prononcer le nom tant il est biscornu (si vous voulez essayer, cliquer ici pour vous exercer !) ?

 

Leçon numéro un : une perte sèche pour les compagnies aériennes ! Le trafic aérien européen est en grande partie paralysé depuis jeudi dernier et on nous annonce pour une compagnie comme Air France KLM  une perte de 30 à 35 millions d'euros par jour ! Par comparaison, rappelons que le dernier exercice bénéficiaire de la compagnie, celui clos en mars 2008, s'était soldé par un résultat net de 748 millions d'euros. Air France KLM  démarre donc un exercice (il a commencé le 1er avril) qui promet d'ores et déjà d'être une troisième année consécutive de pertes !

 

Leçon numéro deux : l'incertitude... ennemie jurée de la Bourse. Tous les jours, on nous annonce la reprise du trafic, tous les jours elle semble repoussée. Pour l'instant en tout cas, la reprise n'est que partielle et j'apporte au passage mon affectueux soutien à Carole, qui se réjouissait de son départ (prévu hier) au Japon. Pour elle, le départ sera au mieux lundi prochain. A condition que le nouveau nuage annoncé hier soir ne nous arrive pas sur le coin de la figure d'ici là. Une chose est au moins certaine, cette éruption ne durera pas toujours. Elle devrait se prolonger entre quelques jours et... un an ! Voilà de quoi nous rassurer.

 

Leçon numéro trois : des compensations hypothétiques. En bonne logique, on pourrait considérer cet événement comme une catastrophe naturelle et les Etats pourraient indemniser les compagnies. Question effet d'annonces, faisons confiance à nos politiques, toujours avides de nettoyer au Kärcher (ou plutôt en paroles!) les banlieues et  toujours prêts à promettre d'éliminer tout ce qui ne va pas, avant de refiler la patate chaude et de passer au dossier suivant au gré des modes médiatiques. Voyons la réalité en face. Nous sortons d'une crise financière qui a "fragilisé le bilan" des Etats : ne nous attendons pas à les voir faire preuve de générosité.

 

Bref, tout cela réuni fait qu'on peut tout de même s'étonner de la résistance - relative - d'Air France KLM  ces derniers jours. Je peux me tromper, mais je n'y mettrais pas un seul de mes deniers avant d'avoir une idée plus précise des conséquences exactes de l'éruption islandaise. Un premier indicateur intéressant sera la publication début mai des chiffres de trafic d'avril, avant évidemment les résultats du premier trimestre 2010/2011 qui seront publiés fin juillet et promettent d'être catastrophiques.

 

Si l'on vend Air France KLM , pourquoi ne pas achetez Accor ! Après tout, le groupe hôtelier doit avoir un taux de remplissage exceptionnel en ce moment, grâce à la manne imprévue de ces centaines de milliers de touristes bloqués. Oui, mais... ceux qui n'ont pas pu arriver ont peut-être annulé des nuitées. Et surtout, comment mesurer les conséquences à moyen terme de cet événement sur l'inconscient collectif. Une partie de ces gens coincés à l'autre bout du monde va revenir en se promettant de ne pas reprendre un avion de si tôt et le faire savoir à tout leur entourage. Dans ce cas, quitte à acheter une valeur du secteur, autant choisir un acteur comme Pierre & Vacances. Dans les périodes de crise, le tourisme de proximité, ça rassure !


Emmanuel Schafroth

 

 

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15 avril 2010 4 15 /04 /avril /2010 18:23

Selon le site internet financier américain 24/7 Wall Street, l'homme qui mérite ce titre n'est autre que le chanteur de U2... Bono !

 

Bono est en effet un des associés du fonds d'investissement Elevation Partners, spécialisé dans le secteur des médias. En janvier dernier, celui-ci a investi 25 millions de dollars dans le site Yelp, spécialisé dans les recommandations d'internautes sur des restaurants et autres commerces de proximité (lire notre article), alors que Google était pressenti pour racheter la société.

 

Il semble que le moteur de recherches ait eu du flair en laissant sa proie potentielle à un autre. Depuis, on a appris que Yelp fait l'objet d'une "class action" de la part de plusieurs commerçants, qui accusent le site d'avoir manipulé les avis d'internautes en leur défaveur sous prétexte qu'ils n'étaient pas clients de l'offre publicitaire de Yelp.

 

On connaît la durée des procès-fleuves qui peuvent suivre de telles actions (cf l'interminable affaire Messier / Vivendi). Voilà en tout cas qui va entacher durablement l'image de Yelp et risque même de gêner toute possibilité de revente de la société.

 

Bono n'en est pas à son coup d'essai en tant qu'investisseur, mais on ne lui connaît pas encore de coup de maître ! Parmi les investissements précédents du chanteur, on trouve par exemple Palm , le fabricant de PDA (assistants personnels), qui a enregistré près de 500 millions de dollars de pertes cumulées sur ses deux derniers exercicesElevation Partners a investi 460 millions de dollars pour acquérir 30% de la société et sa participation ne vaut plus aujourd'hui que 280 millions environ. Les pertes de la compagnie se sont aggravées au troisième trimestre de son exercice 2009/2010. Il faut dire qu'entretemps, une autre société a inventé une sorte de PDA faisant également office de téléphone. Vous avez sans doute entendu parler de ce produit : cela s'appelle l'iPhone et la société... Bref, ex-star de l'électronique grand public, Palm cherche désormais un repreneur. Désespérément ?

 

Autre investissement malheureux d'Elevation Partners, le site immobilier move.com : le fonds a injecté 100 millions de dollars dans la société en novembre 2005 et le cours a été divisé par deux depuis !

 

Dernière opération en date, Bono aurait investi quelque 90 millions de dollars pour prendre 1% de Facebook. Espérons qu'il ne porte pas la poisse au réseau social !

 

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28 mars 2010 7 28 /03 /mars /2010 14:58

On ne nous dit pas tout !  Les gens sont méchants ! C'est toujours beaucoup plus pratique d'avoir un ennemi informel plutôt que nominatif : on peut ainsi le critiquer sans qu'il se défende.


Quand il s'agit de critiquer la finance, c'est encore plus pratique, car la bête immonde et honnie a certes des contours suffisamment peu définis pour qu'on puisse s'y attaquer sans risque, mais a cependant un nom, comme le yéti ou le monstre du Loch Ness ! Il s'agit, vous l'avez deviné, du Grand Méchant CAC40.


On ne compte plus les hommes politiques, de droite ou de gauche, et les syndicalistes qui agitent ce chiffon rouge dès que l'occasion leur en est donnée. On les comprend ! Quel plus bel ennemi peut-on rêver que ce CAC40 tentaculaire, besace aussi pratique qu'extensible dans laquelle on peut fourrer pêle-mêle les banquiers et leur bonus, les patrons et leurs parachutes dorés, les actionnaires et leurs dividendes.


Le CAC40, c'est facile à prononcer, à retenir et à manipuler, d'autant que le vulgus pecum en entend parler tous les jours à la radio sans vraiment savoir ce que c'est. Un concept en or massif pour faire du clientélisme politique, ce fameux clientélisme que l'hebdomadaire Mariannedénonce si régulièrement... tout en le pratiquant à tour de bras vis à vis de son lectorat, sur le mode du "tous pourris". En témoigne, dans le numéro 673 daté du 16 au 22 mars, une chronique signée Jack Dion sur ces vilains actionnaires qui ne pensent qu'à "jeter des salariés sur le carreau".

Prompt à voir du manichéisme chez ses confrères (François Sergent, de Libération, s'était attiré ses foudres pour avoir osé critiquer la Russie lors de l'intervention militaire en Géorgie), il n'y va lui-même pas de main morte. Après la fameuse accroche chère aux journalistes - et qui a tendance, dans Marianne, a souffrir d'une hypertrophie marquée - notre homme lâche d'emblée le chiffre qui tue, surtout quand il est totalement dépourvu d'argumentaire : 49 milliards d'euros de bénéfices pour les entreprises du CAC40 en 2009. Compte tenu de ce qui suit, peut-être faudrait-il préciser que ce chiffre livré brut de décoffrage entretient à merveille la confusion entre bénéfices réalisés par les entreprises françaises (36 sociétés du CAC40 le sont) et bénéfices réalisés en France (environ 75% de ce chiffre provient en fait d'activités à l'étranger). Mais passons !


Visiblement à bout de souffle et d'idées à la fin de la première colonne de l'article (les mots "retraites chapeaux" et "dividendes" ayant déjà été lâchés, il faut bien trouver autre chose !), Jack Dion bascule dans la bêtise dès le début de la deuxième. Il nous affirme tout de go que, pour les actionnaires, "la crise n'est plus qu'un lointain souvenir". En effet, les entreprises ont trouvé une recette fabuleuse pour les contenter : leur servir un "dividende survitaminé".
 

Sans doute pour nous prouver son ignorance crasse de la chose financière, notre Jack l'Eventreur (de vérités) prend à ce sujet un exemple magnifique, qui lui permet de nous servir deux idioties dans la même phrase. "Certains groupes, comme Saint-Gobain, sont même allés jusqu'à distribuer sous forme de dividende une somme supérieure au bénéfice enregistré, ce qui confine au mécénat".

Saint-Gobain a décidé de maintenir au titre de 2009 son dividende à 1 euro par action ce qui correspond à plus de 500 millions d'euros distribués au total : un chiffre en effet supérieur au bénéfice annuel (202 millions). On renverra cependant le petit Jack à ses chères études afin qu'il découvre la notion de "bénéfice distribuable" : celui-ci est constitué du bénéfice de l'exercice (diminué des pertes antérieures) auquel on ajoute les sommes portées en réserve (c'est à dire les bénéfices antérieurs qui n'ont pas été distribués). Dans le cas de Saint-Gobain, cet agrégat, qui figure au passif du bilan, représentait plus de 10 milliards d'euros à fin 2009, ce qui relativise le dividende proposé. N'est pas comptable qui veut !


Mais notre journaliste pas très féru de finance d'entreprise aurait sans doute quelque peine à repasser ne serait-ce que son brevet des collèges, étant donné son niveau en mathématiques. Pour les actionnaires qui ont acheté du Saint-Gobain entre 60 et 85 euros en 2007 et détiennent maintenant une action qui en vaut 36, la crise est un peu plus qu'un "lointain souvenir", dividende ou pas. Loin d'être du mécénat, ce dividende-là apparaît comme un pansement encore un peu petit pour la blessure, et il n'est jamais que la rémunération du capital, tout comme le salaire est celle du travail. Rien de neuf dans tout celà !


L'ire du journaliste se porte aussi contre Total. Evidemment, serait-on tenté d'ajouter ! Figurez-vous que notre fin limier découvre avec stupeur que cette société pétrolière préfère investir en Arabie saoudite qu'en France ! Quoi de plus ridicule ! Un peu comme si les Islandais refusaient d'investir dans la culture de la banane. Insensé, avouons-le !


Voici donc Total érigé en archétype de ces sociétés qui pratiquent "l'investissement zéro" en France, préférant aller conquérir des Chine et des Inde où les gens acceptent de "travailler pour un bol de riz". Ah bon ? Les sociétés françaises n'investissent plus en France ?  Que dire de Vivendi ! Les deux tiers des 2,56 milliards d'euros d'investissements réalisés par le groupe en 2009 concernent sa filiale SFR... qui travaille exclusivement en France !


Jack Dion est un homme en colère contre les dividendes, ce "racket", ce "mécénat" des entreprises en faveur de leurs actionnaires. Ce monsieur devrait tout de même se demander comment sont nées ces entreprises, comment elles ont grandi, comment elles se financent, si ce n'est grâce à l'argent fourni par leurs actionnaires, leurs porteurs obligataires et même, parfois, leurs banquiers !


Le courroux est un noble sentiment, mais il est encore plus beau quand il est étayé d'arguments ! Malheureusement, Marianne préfère souvent le bon mot à l'information, la petite phrase montée en chantilly à l'argument, la forme au fond. Caresser le lecteur dans le sens du poil plutôt que de l'informer... Finalement, le résultat n'est pas si différent de celui que montre un certain président hypercommunicant, si souvent brocardé dans les colonnes de l'hebdo. Mais après  la raclée magistrale de la droite aux régionales, les journaux devraient prendre garde à leur tour au vote-sanction. Après tout, il n'y a qu'une lettre de différence entre lecteur et électeur !

Emmanuel Schafroth

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24 mars 2010 3 24 /03 /mars /2010 10:50
En apparence, tout va bien pour Iliad, qui a annoncé un bénéfice net en hausse de 75,2% en 2009. Pourquoi donc le groupe Internet évoque-t-il une possible hausse de tarifs ?

Comme le raconte cet article de 01net, le patron-fondateur d'Iliad a pronostiqué, lors de la réunion de présentation des résultats, une hausse des tarifs de l'accès Internet de l'ordre de 5 euros par mois d'ici la fin de l'année. S'il présente cette évolution comme "généralisée", il ne faut pas être grand clerc pour y lire une prochaine augmentation des tarifs de Free et Alice, les deux filiales d'Iliad.

Cela peut sembler curieux alors que le groupe a depuis toujours fait son miel sur une stratégie low cost, imposant à tous ses concurrents la règle du "30 euros par mois tout compris". Et surtout, Iliad ne semble pas avoir besoin d'un tel coup de pouce, ayant réalisé en 2009 un bénéfice en progression de 75,2%, à 175,9 millions d'euros !

Iliad présente ce chiffre comme le signe du succès de l'intégration d'Alice, racheté en 2008. Mais les choses ne sont pas si simples ! Même avec le rebond enregistré en 2009, la marge nette du groupe, à 9%, reste sensiblement inférieure au niveau atteint en 2007 (12,4%), dernière année avant l'acquisition d'Alice.

Et surtout, le modèle gagnant du groupe semble avoir quelque ratés. Au dernier trimestre 2009, sa part dans la conquête de nouveaux abonnés s'est réduite à la portion congrue face aux ogres SFR et Bouygues (lire notre article précédent).

Les chiffres à fin mars révéleront sans doute que SFR est repassé devant Iliad en nombre d'abonnés et Bouygues, nouvel entrant du marché, se montre particulièrement agressif.

Autant dire que le profil de croissance du groupe est désormais fort dégradé, comme le soulignait récemment Bryan Garnier (lire notre article "La sorcière numéro quatre"). Et ce, au moment où Iliad doit faire face à des investissements importants : le plan 2006 d'Iliad prévoyait 1 milliard d'euros d'investissements dans la fibre optique d'ici à 2012. Et il faudra encore un autre milliard pour développer le mobile ! Dans ces conditions, la rentabilité risque d'être tirée vers le bas dans les prochaines années.

Pour 2010, le groupe affiche cependant sa confiance, prédisant une "très forte augmentation" de ses bénéfices, malgré l'intensification de la concurrence. Etonnament, Thomas Reynaud, directeur financier d'Iliad, semble balayer d'un revers de la main l'annonce par France Télécom d'une offre "quadruple play" (téléphonie fixe, mobile, internet, télévision), arguant qu'elle ne "répond pas aux attentes des abonnés". Pourtant, comment expliquer autrement le succès fulgurant de l'offre Ideo qui a permis à Bouygues de convaincre plus de 300.000 clients en 2009.

Une chose est sûre. Le marché de base d'Iliad commence à arriver à maturité alors que ses relais de croissance ne sont pas encore en place et que la concurrence se renforce. 2010 sera tout sauf une année de tranquillité !
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23 février 2010 2 23 /02 /février /2010 08:53
Quand il y a une grève chez Total, le patron se fait convoquer par le Ministre de l'Industrie, qui peut ensuite se fendre d'un communiqué pour nous dire tout le bien qu'il pense de son propre travail. Mais quand Alcatel-Lucent publie un profit-warning, c'est le marché, non le ministre, qui s'agite...

Dans un pareil cas, pour se refaire une image, la société s' "auto-convoque"  en quelque sorte devant le marché, en allant faire la "tournée des popotes" des investisseurs les plus influents au pays. Ou de la planète... Tout dépend évidemment de la taille de l'entreprise, et surtout du budget consacré à cette opération marketing d'envergure, qu'on appelle un road show !

Alcatel-Lucent s'est donc prêté à ce jeu de séduction à la suite d'un quatrième exercice consécutif dans le rouge (une perte de 524 millions d'euros en 2009). Objectif : rassurer sur le fait que, au-delà de prévisions abaissées pour 2010, le groupe est paré pour les mutations technologiques de son secteur.

Alcatel-Lucent, très présent sur les réseaux terrestres haut-débit (DSL) où la valeur ajoutée est désormais faible, a ainsi recentré sa recherche-développement sur les nouveaux produits : ils concernent 70% des budgets, contre 40% il y a deux ans. Le groupe entend ainsi gagner des parts de marché dans la téléphonie mobile. Il avait quelque peu manqué la marche de la "3G", où sa part de marché est de 13% seulement. Son ambition : parvenir à 20% de part de marché sur la génération suivante, baptisée LTE (long term evolution).

Le groupe franco-américain a déjà été sélectionné l'an dernier par l'opérateur américain Verizon et cette nouvelle vague technologique lui permet d'espérer qu'il réussira à partir de 2011 ce qu'on attend de toute société commerciale : générer un flux de cash positif !

La belle histoire d'un Alcatel enfin sur les rails de la rentabilité a de quoi séduire. Reste à vérifier que ce joli scénario ne donnera pas un mauvais film.
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30 janvier 2010 6 30 /01 /janvier /2010 13:21

Décidément, on dirait que Bernard Arnault et le web, ça fait deux. Le patron de LVMH serait en train de lâcher son nouveau joujou internet, Rentabiliweb. Retour sur quelques amours contrariées d'un grand patron avec les nouvelles technologies.

Il y a 10 ans, en effet, on aurait pu croire que le roi du luxe allait devenir un prince du Net. Bernard Arnault venait alors de mettre sur pied un holding dédié aux investissements dans les nouvelles technologies et baptisé Europ@web (avec le fameux arobase au milieu pour assurer une crédibilité sans faille!).

Via ce véhicule, le milliardaire fit alors feu de tout bois, sans jamais réussir à convaincre. En 2000, alors que le marché boursier s'étoffe chaque jour d'une nouvelle valeur internet - vraie ou fausse - et que l'exubérance est à son comble, Bernard Arnault ne manque certes pas le coche en introduisant en Bourse à la mi-mars le fournisseur d'accès internet Liberty Surf, filiale commune de Europ@web et du distributeur britannique Kingfisher. En dépit de tout bon sens - et du droit boursier -, Liberty Surf, qui n'a même pas un an d'existence, fait son entrée directement au Premier Marché de la Bourse de Paris. La valorisation est astronomique ! Au prix finalement retenu (41 euros par action), l'entreprise vaut alors 3 milliards d'euros avant augmentation de capital, soit 150 fois le chiffre d'affaires 1999 pro forma. Mais pas pour longtemps !

La société ayant été introduite exactement au sommet de la bulle internet, son histoire boursière se confond avec celle de l'éclatement de ladite bulle. L'aventure tourne court très vite avec le rachat par Tiscali, début 2001, qui ne valorise déjà plus l'entreprise qu'à un peu moins de 10 euros par titre, l'essentiel étant d'ailleurs payé en monnaie de singe... c'est-à-dire en actions Tiscali. La sortie définitive de la cote n'interviendra qu'en septembre 2005 pour Liberty Surf, avec une procédure de retrait obligatoire à... 2,78 euros !

Peut-être se souvient-on aussi de Zebank, un des pionniers de la banque en ligne en France. Un pionnier, mais un vrai fiasco ! Inaugurée en 2001, Zebank aurait englouti 150 millions d'euros d'investissement, avant d'être cédé en 2002 à la filiale de Egg, laquelle, faute de réussir à percer en France, fut finalement revendue à la Banque Accord (groupe Auchan).

Pour la présidence de Zebank, Bernard Arnaultavait choisi une personnalité en vue du monde des affaires : énarque et inspecteur des finances, Philippe Jaffré est connu pour avoir présidé aux destinées d'Elf Aquitaine entre 1993 et le rachat par Total en 2000. Pas vraiment le profil du web-entrepreneur, donc ! Le nom de Zebank ne manquait pas d'humour, mais l'humour n'est pas nécessairement la première qualité qu'on demande aux gens à qui on confie sa fortune ! Et face aux infortunes de Zebank, les journalistes qui, comme chacun sait, sont de méchantes gens, eurent tôt fait de rebaptiser l'entreprise... Zecatastrophe, Zefaillite !

L'aventure eLuxury, elle, aura duré plus longtemps. Lancé en 2000, le site de distribution en ligne de marques de luxe fermera finalement en juin 2009. Voila encore un exemple de pionnier qui a acheté sa pioche parmi les premiers, mais n'a jamais vraiment réussi à découvrir de l'or ! Le quotidien Women' s Wear Daily note alors que "le site n'a plus de raison d’être puisque de nombreuses marques ont désormais une présence significative en ligne". Une jolie périphrase pour éviter le mot "échec" ! Censé devenir un magazine en ligne, eLuxury a pour l'heure disparu de la toile.

Sans doute lassé de ses échecs en série, Bernard Arnault a cru trouver la poule aux oeufs d'or en rencontrant JBDV : Jean-Baptiste Descroix-Vernier !

Patron de Rentabiliweb, celui-ci appelle ses employés des ninjas, habite sur une péniche à Amsterdam et est venu à la réunion d'introduction de sa société, fin 2006, habillé en kilt et accompagné de son pitbull. Un véritable entrepreneur nouvelle génération, pour le coup !

En juin 2007, Bernard Arnault est ainsi entré au capital de Rentabiliweb, dont un des administrateurs n'est autre que Jean-Marie Messier, ex-grand patron également en mal de web-credibility ! C'est alors que le holding via lequel JBDV contrôle son entreprise a changé de nom, Golden Glawis (sic) devenant Saint-Georges Finance. Ca fait tout de même plus sérieux !

Mais voilà que Rentabiliweb commence à faire des siennes ! L'entreprise est certes rentable (6,7 millions d'euros de bénéfices en 2008), à défaut d'être très transparente sur son activité réelle, et notamment la part des sites adultes dans le chiffre d'affaires. Mais la distribution ratée de billets de banque dans les rues de Paris par Mailorama, filiale de Rentabiliweb, a de nouveau fait désordre, fin 2009. L'initiative, ardemment défendue par le philosophe de salon Bernard-Henri Lévy, qui se dit au passage l'ami de JBDV (sic!), semble avoir déplu au patron de LVMH.

Comme Stéphane Courbit (ancien patron d'Endemol), Bernard Arnault va céder une partie de ses titres à l'occasion de l'opération mixte (augmentation de capital et cession de titres existants) que vient de lancer Rentabiliweb. A la tête de cette entreprise spécialisée dans la monétisation d'audience, JBDV n'oublie pas de monétiser pour lui-même : il va céder quelque 780.000 titres à l'occasion de cette opération, ce qui devrait lui rapporter 5,5 millions d'euros environ. N'est-ce pas le début des "golden glawis" qui lui font tant envie ?

Quant à Bernard Arnault, il pourra toujours se consoler avec sa participation de 9% dans Seloger.com. Même sur internet, l'immobilier, c'est du solide !








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